La poussière commence tranquillement à retomber. Nous ne sommes plus dans le déni et nous commençons à réaliser que la situation est belle et bien réelle. Plusieurs magasins à grandes surfaces ont commencé à fermer boutique, les bars et la plupart des restaurants ne sont plus ouverts…
Bien que l’on souhaiterait tous épargner nos employés, certaines organisations doivent se rendre à l’évidence: le niveau d’activité connaît une importante diminution, qui menace la pérennité de l’entreprise. En ces temps particuliers, plusieurs évaluent différents scénarios afin de garder le bateau à flot, au minimum, d’ici à ce qu’ils puissent rebondir.
Les employés posent de plus en plus de questions puisqu’ils sont, eux aussi, affectés par les retombées de la COVID-19, et inquiets des répercussions sur leur travail et leurs finances. Bien sûr, leurs questions sont légitimes. Bien sûr, on aimerait les rassurer et connaître l’avenir, être en mesure de leur donner l’heure juste… Mais le fait est qu’on fait présentement face à une situation exceptionnelle, et les réponses toutes faites n’existent pas. Il n’y a pas vraiment de bonnes pratiques testées et éprouvées sur lesquelles se replier, cette fois-ci.
En plus des considérations humaines, reste aussi que les organisations souhaitent trouver une façon de conserver leur précieux bassin de talents, tout en assurant leur pérennité.
Les gouvernements, les banques et plusieurs autres instances gouvernementale ont pris les devants en offrant, aux particuliers et aux entreprises, des mesures qui sont (ô combien!) bienvenues. Accès facilité à du crédit pour les entreprises, bonification de certaines prestations sociales, pauses sur les paiements hypothécaires… la liste s’allonge de jour en jour – et il le faut, puisque plusieurs citoyens n’ont pas encore accès à des mesures qui répondent à leur situation particulière.
Mise à pied temporaire, licenciements, licenciements collectifs… voilà des mesures qui font beaucoup jaser depuis le début de la semaine. Certaines organisations, par mesure de prévention, ont pris action rapidement – et on ne peut que comprendre leur choix de sauver les meubles – comme on dit. Or, avant de prendre ce genre de décision, il serait avisé de considérer des scénarios alternatifs, comme le Travail partagé.
Le Travail partagé est un programme d’adaptation destiné à aider les employeurs et les employés à éviter les mises à pied suite à une diminution temporaire et involontaire du niveau d’activité normal de l’entreprise. Cette mesure permet de garantir un certain niveau de revenu aux employés admissibles aux prestations d’assurance-emploi. Sous le programme, ceux-ci acceptent de réduire temporairement le nombre d’heures dans leur semaine de travail, durant la période de redressement de l’entreprise[1].
Le Travail partagé est une entente entre l’employeur, les employés et Service Canada. Tous les employés doivent convenir d’une réduction de leurs heures de travail afin de répartir l’ensemble du travail à effectuer entre eux. L’objectif du programme est que les employés retrouvent leurs heures normales de travail avant la fin de l’entente.
EMPLOYEURS ADMISSIBLES |
EMPLOYEURS INADMISSIBLES |
Être une société ouverte, une entreprise privée ou un organisme à but non lucratif[2]; | Les entreprises qui connaissent une diminution de leurs activités en raison d’un conflit de travail; |
L’entreprise doit être exploitée, à l’année, au Canada, et ce depuis au moins deux (2) ans; | Les entreprises qui connaissent une diminution de leurs activités en raison d’une pénurie de travail saisonnière ou toute autre période de ralentissement cyclique; |
Démontrer une diminution récente des activités d’environ 10%; | Les entreprises qui connaissent une diminution de leurs activités en raison d’une augmentation de leur effectif (Par exemple, Au mois de juillet, une organisation embauche 10 employés, doublant ainsi les membres de l’équipe. Trois mois plus tard, une pénurie de travail survient et il y a du travail pour seulement la moitié des 20 employés.) |
Démontrer que la pénurie de travail est temporaire et hors de contrôle (qu’il ne s’agit pas d’un ralentissement récurrent); | |
Présenter un plan de redressement qui permettra à l’unité de Travail partagé de revenir aux heures normales de travail avant la fin de l’entente; |
Le programme de Travail partagé peut s’avérer une bonne solution si :
EMPLOYÉS ADMISSIBLES |
EMPLOYÉS INADMISSIBLES |
Être des employés permanents à temps plein ou à temps partiel qui accomplissent les tâches quotidiennes liées aux activités normales de l’entreprise; | Les employés saisonniers et les étudiants embauchés durant l’été ou pour un stage COOP; |
Avoir droit à des prestations d’assurance-emploi; | Les employés occasionnels, sur demande ou embauchés via une agence de placement temporaire; |
Accepter une diminution des heures normales de travail pour partager le travail disponible; | Les employés actionnaires qui possèdent plus de 40% des parts de l’entreprise. |
Les employés temporaires qui n’ont pas été embauchés sur une base saisonnière et qui ont travaillé des heures semblables aux employés permanents à temps plein ou à temps partiel au cours des 12 deniers mois; | |
Les employés permanents à temps plein ou à temps partiel qui ont été mis à pied avant la date d’entrée en vigueur de l’entente de Travail partagé. |
L’unité de travail se définit comme étant un groupe d’employés permanents qui acceptent de participer au programme. L’entente de Travail partagé peut inclure différentes unités. Ceci étant dit, une unité équivaut, la plupart du temps, à l’ensemble des employés qui effectuent la même description de tâche ou, du moins, des employés qui accomplissent des tâches similaires.
Par exemple, une unité de travail d’une organisation œuvrant dans le commerce au détail pourrait être l’ensemble des employés qui ont le poste de caissière.
Tous les employés d’une même unité de Travail partagé doivent, d’un commun accord, accepter de réduire leurs heures normales de travail pour partager, à travers toute l’unité, le travail disponible. Advenant le cas qu’un surplus de travail surviendrait durant l’entente de Travail partagé, les heures supplémentaires devront être réparties de façon équitable entre tous les employés faisant parties de l’unité.
Il est important de comprendre que tous les employés qui ont la même description de poste doivent participer au programme de Travail partagé pour que ce dernier puisse être approuvé par Service Canada. Ceci dit, les employés qui ne sont pas admissibles aux prestations d’assurance-emploi ou qui refusent d’en recevoir sont quand même tenus de réduire leurs heures de travail dans une proportion égale aux autres employés.
Les ententes de Travail partagé doivent inclure une réduction des heures normales des employés de 10% (une demi-journée) à 60% (trois jours). La réduction ne doit pas forcément être la même pour toutes les semaines du programme, mais doit tout de même avoir une moyenne se situant entre 10% et 60% pour la durée de l’entente.
Ainsi, l’employé est payé à son taux régulier par votre organisation pour les heures travaillées, et reçoit des prestations d’assurance emploi pour les heures manquantes, au pro-rata des heures non-travaillées.
Voici un exemple :
Marie est représentante chez Planchers 360, et gagne un salaire annuel de 70,000 $.
En raison de la crise COVID-19, les commandes de l’entreprise et les questions des clients ont chuté de façon significative. Bien que la situation soit difficile pour l’entreprise, les dirigeants de Planchers 360 sont confiants de pouvoir passer à travers, et de reprendre leurs activités une fois la crise passée. Ils décident donc de proposer à leurs trois représentants (l’unité de travail de Marie), de faire une demande pour le programme de Travail partagé auprès de Service Canada.
Si la demande est acceptée, Planchers 360 compte réduire les heures de 60%.
La rémunération hebdomadaire de Marie sera donc calculée ainsi :
Paie par Planchers 306:
70 000 $ (salaire annuel) /52 semaines * 0,4 (40% des heures régulières travaillées) = 538,46 $ brupt, moins les charges salariales habituelles
Prestations d’assurance-emploi:
Comme le salaire de Marie est plus élevé que le maximum de la rémunération assurable de 54 200 $ (2020), ses prestations seront calculées avec un salaire de 54 200 $ :54 200$ (salaire annuel maximal) / 52 semaines * 0,55 (remplacement de salaire de 55% offert par le programme d’assurance-emploi) * 0,6 (60% des heures régulières en chômage) = 343,96 brupt
Sous le programme de Travail partagé, les prestations d’assurance-emploi ne seront pas réduites, même si Marie continue de recevoir un salaire chez Planchers 360.
La durée de l’entente de Travail partagé doit être d’au minimum 6 semaines et d’au maximum 26 semaines, avec une possibilité de prolongation d’au plus 12 semaines. Donc, le programme de Travail partagé pourrait avoir une durée maximale de 38 semaines, incluant la période de prolongation.
L’organisation qui veut bénéficier du programme de Travail partagé se doit de remplir un plan de redressement qui démontre qu’elle fera tout en son possible pour que l’unité de Travail partagé puisse revenir à des heures normales de travail, et ce au plus tard à la fin de l’entente.
Les participants au programme de Travail partagé ne sont pas assujettis à la période d’attente obligatoire pour l’obtention des prestations.
Les prestations sont basées sur le salaire moyen hebdomadaire normal de l’employé. Pour les employés qui travaillent des heures irrégulières, le revenu hebdomadaire moyen correspondra à la moyenne des heures travaillées par semaine durant les deux dernières années.
L’employeur doit maintenir tous les avantages sociaux des employés (assurances collectives, régime de retraite / RÉER, vacances prestations d’invalidités, etc.) durant toute la durée de l’entente de Travail partagé. Cependant, les avantages sociaux pourraient être réduits si leur calcul se fait en fonction du salaire ou des heures de travail des employés.
Plus tôt cette semaine, le gouvernement fédéral a annoncé des mesures spéciales temporaires qui permettraient aux différentes organisations de conserver leurs employés malgré la diminution des activités. Les principales mesures mises en place sont les suivantes :
Faites-vite!
Le délai de réponse est d’au moins 30 jours et plusieurs organisations voudront y participer dans les prochaines semaines.
Pour d’autres conseils sur la gestion de vos RH durant la crise, consultez notre boîte à outils gratuite sur la situation du COVID-19
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En ces temps particuliers, nous sommes là pour vous guider avec vos questions RH.
[1] Guide p.4
[2] Il est à noter que pour qu’un organisme à but non lucratif soit admissible, la pénurie de travail doit être directement liée à une diminution du niveau normal d’activités de l’organisation, et non pas liée à une diminution de ses revenus.